Un vivant qui passe

En cours jusqu'au Sam. 22 Janvier

Que voit le témoin, que voit le spectateur? Qu’est-ce que voir? Nicolas Bouchaud donne à entendre cet entretien troublant qui semble nous adresser des questions toujours d’actualité.

En 1942, Maurice Rossel est un jeune officier suisse de 25 ans qui rejoint le Comité international de la Croix-Rouge. Il sera bientôt envoyé à Berlin pour inspecter les camps de prisonniers. Plus de trois décennies plus tard, alors qu’il prépare son film Shoah, Claude Lanzmann cherche à le rencontrer car il fut l’auteur d’un rapport controversé sur le ghetto de Therensienstadt. Devant la caméra du cinéaste, le docteur Rossel raconte sa visite du camp d’Auschwitz. Il exprime le sentiment d’horreur qu’il a ressenti, relève l’ambiguïté de sa position d’humanitaire à l’action plus que restreinte. Il n’a pourtant rien vu, dit-il, qui aurait pu lui signifier ce qui s’y passait réellement. Claude Lanzmann l’invite à décrire sa visite de Theresienstadt, un ghetto « modèle » dans laquelle des juifs·ves doivent jouer la comédie de la vie courante sous peine de mort – alors même que ce n’était qu’une étape de transit vers les camps d’extermination. Sa visite a été mise en scène au mètre et à la seconde près, et Maurice Rossel consent à être le spectateur de cette pièce de théâtre qui lui est présentée.

Le film de Claude Lanzmann sort en 1997 et a rarement été projeté en Suisse.

Avec Un vivant qui passe, Nicolas Bouchaud poursuit une série de spectacles sur des paroles majeures du XXe siècle qu’il conçoit avec la complicité du metteur en scène Eric Didry et de la dramaturge Véronique Timsit: un projet d’acteur amené à interroger la scène comme lieu de partage et de transmission par l’interprétation de textes non-théâtraux. Que voyons-nous, que regardons-nous? Comment devient-on spectateur, ou témoin? Le docteur Rossel n’a pas su ou n’a pas voulu prendre sa part dans l’histoire à laquelle il était confronté. L’écouter, sans juger, c’est attendre un mot, une phrase, non pas de culpabilité mais de responsabilité, de ce qui lui revient, de ce qui nous revient. À l’écoute de ce dialogue dans lequel affleurent les questions de réel et de vérité, Nicolas Bouchaud invite à son tour l’histoire à comparaître sur la scène d’une histoire qui est aussi la nôtre.


Informations
Auteur, adaptation
Nicolas Bouchaud, Éric Didry, Véronique Timsit
Comédiens
Nicolas BOUCHAUD, Frédéric NOAILLE
Mise en scène
Éric Didry
Scénographie
Élise Capdenat, Pia de Compiègne
Lumière
Philippe Berthomé, Jean-Jacques Beaudouin
Son
Manuel Coursin
Compagnie
Otto Productions, Théâtre Garonne
Coproduction
Festival d’automne, Paris - Théâtre de la Bastille - La Comédie de Clermont-Ferrand scène nationale - Bonlieu Scène Nationale d’Annecy - Théâtre National de Nice - La Comédie de Caen CDN
Durée
1h30
Entracte
Non